Petites discussions entre juges… Tome 2

Pédagogie
Cet article a été publié le : 27 septembre 2011 à 14h13
Petites discussions entre juges… Tome 2

Nathalie Carrière


Qui a dit que les juges étaient austères? Pas en Complet en tout cas! (ici Nathalie Carrière)

Hier, nous avons vu comment jugeaient les juges. Aujourd’hui, nous nous intéressons aux juges en eux-mêmes : qui sont-ils ? Qu’est-ce que ça implique pour eux ? Comment vivent-ils leur passion ?… Pour rappel, les interviewés sont : Michèle Lucenay, Nathalie Carrière, Solange Panetier, Eric Lieby, Emmanuelle Malandain et Florence de Fligué.

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez en tant que juge ?

Michèle : « On ne voit souvent pas la même chose selon la position qu’on occupe. Par exemple, un arrêt de face peut paraître très bien alors que de profil on voit que le cheval est campé ou décalé derrière. »

Florence : « Pour les changements de pied, c’est très fugitif et parfois difficile de savoir si le changement est passé en 1 temps ou en 2. »

Solange : « Dans le doute, on ne met pas la mauvaise note ! »

Eric : « La concentration est un facteur difficile à préserver, c’est pourquoi à haut niveau on a autant de pauses et un maximum de 40 chevaux à juger dans la journée. Mais un juge qui entre dans sa cabane à 7h du matin et qui en ressort à 18h le soir sur les petits niveaux peut difficilement faire du bon travail. »

Florence : « L’ordre des critères variant d’un niveau à l’autre, il faut aussi s’adapter rapidement à changer de niveau. »

Etes-vous aussi juge de dressage pur ?

Michèle : « Oui, surtout l’hiver, quand la saison de Complet est terminé. Mais ça ne m’amuse pas plus que ça et dès que les Complets reprennent, je privilégie cette discipline ! C’est beaucoup plus sympa, même si l’ambiance est en train de changer en dressage. Les dresseurs commencent à se regarder un peu moins le nombril ! »

Florence : Moi c’est pareil, je préfère juger le Complet, même si je fais aussi un peu de dressage. Les priorités ne sont pas les mêmes mais on note de la même façon. »

Eric : « Moi ça fait 33 ans que je ne juge que le Complet et ça suffit à mon bonheur ! »

Emmanuelle : « Je monte en dressage pur mais je ne juge pas car je n’ai pas passé l’examen. »

Solange : « J’ai été pendant longtemps juge de dressage. Il n’y a pas de différence fondamentale entre les deux, c’est surtout les chevaux qui sont différents. »

Quelles sont vos relations avec les cavaliers de Complet ?

 »Excellentes ! », à l’unanimité. « Il y a une très bonne ambiance dans cette discipline, on est un peu comme une grande famille ! », ajoute Michèle.

Quels conseils pourriez-vous donner aux cavaliers ?

Michèle : « Nous n’avons pas vraiment de conseil à leur donner car à ce niveau, ils savent très bien ce qu’ils font. Par contre, ça pourrait être intéressant pour eux de venir avec nous dans les cabanes pour qu’ils se rendent mieux compte de notre travail. »

Florence : « Quand il y a une faute sur un mouvement, il faut que le cavalier fasse l’effort de se corriger la fois d’après. »

Eric : « Il faudrait aussi que les cavaliers connaissent leur règlement ! »

Florence : « … ou ne pas faire comme s’ils ne le connaissaient pas (ça vaut aussi pour les coachs) ! »

Combien de concours jugez-vous par an ?

Eric : « En terme de concours je ne sais pas, mais je juge plus de 1 000 chevaux par an. »

Michèle : « De mars à novembre, je juge quasiment tous les week-ends sauf en août. Depuis que je ne travaille plus, je peux me consacrer à fond sur ma fonction de juge. »

Florence : « Pour moi c’est un peu compliqué car je monte aussi et je groom Alix sur ses concours. De ce fait, on établit un programme théorique en début de saison. Je pense que ça représente une dizaine de compétition à juger par an, de différents niveaux. »

Emmanuelle : « J’ai le même problème que Florence puisque j’alterne entre mes concours, ceux de mon mari et les concours où je juge. Ce n’est pas toujours évident et en plus il faut que je prenne des congés pour aller juger. »

La réclamation des juges (parce qu’eux aussi, ils ont le droit d’en avoir!) :

« On aimerait avoir une unité dans notre tenue, que la Fédération nous fournisse une tenue officielle de juge. »

Le mot de la fin :

Michèle : « Je n’arrêterai pour rien au monde. Le Complet est une super discipline et on fera tout ce qui est en notre pouvoir pour la défendre ! »

Florence : « Juger m’a appris beaucoup de choses sur le fonctionnement des chevaux. »

Emmanuelle : « C’est très enrichissant dans les échanges entre les juges, les cavaliers et les coachs. »

Eric : « J’espère avoir la santé le plus longtemps possible pour pouvoir continuer, car c’est important d’être en forme. Le dressage demande beaucoup de concentration, le cross est une partie stressante car ça représente une grosse responsabilité. Il faut parfois prendre des décisions importantes rapidement. On appréhende toujours que quelque chose se passe mal. Et puis il faut être en forme physiquement pour les reconnaissances, etc. »

Solange : « C’est une activité passionnante dont on ne se lasse pas et qu’on essaye toujours de parfaire. »

Nathalie : « J’ai trouvé cet échange très sympa car ça nous a permis de voir que tout le monde est encore très passionné ! Juger repose sur du bénévolat, ce que le public ne sait pas forcément. C’est donc important de voir qu’on y trouve quand même une satisfaction et une valorisation personnelle. Pour moi, juger me permet de conserver un certain niveau technique. Pour être un bon formateur, il faire l’effort de se maintenir, voire de progresser. C’est un recyclage permanent ! Cela me manquerait énormément d’arrêter de juger, tant sur le plan professionnel que personnel. »

Propos recueillis par Hedwige Favre