Marie-Christine Duroy : retour sur ses années de compétition

Sport
Cet article a été publié le : 05 avril 2011 à 6h42
Marie-Christine Duroy : retour sur ses années de compétition


La saga Marie-Christine Duroy continue aujourd’hui avec un retour sur ses années au plus haut niveau. Pour ceux qui l’auraient oublié, elle a pris part à 4 olympiades de 1984 à 1996 avec 3 chevaux différents, a été 3 fois

Vice-championne du Monde par équipe, 3 fois sur le podium aux Championnats d’Europe et 7 fois Championne de France! Au mythique concours de Baminton, elle était 6ème en 1993 avec Quart du Placineau et 8ème en 1995 avec Yarlands Summersong.

Quel est votre meilleur souvenir de compétition?

« … Sûrement Badminton. Participer à ce concours, au-delà du résultat qui bien évidemment intervient dans le plaisir, a été un excellent moment… »

Mieux que les Jeux Olympiques?

« Oui et non! J’ai un très bon souvenir de Los Angeles. Comme c’était mes premiers Jeux, même si j’ai fait un refus, ça reste un moment inoubliable. Donc les Jeux Olympiques oui, mais c’est tellement un monde à part, que les souvenirs aussi sont à part! Sur le plan sportif, Badminton c’est beaucoup plus fort! Pour moi, ça a été le challenge le plus excitant que j’ai fait. Et les 2 versions ont été aussi intenses. »

Les Jeux Olympiques : « à part » à quel niveau?

« Hé bien par exemple à Los Angeles, quand je suis arrivée au village olympique, je me suis dit : « J’ai réussi quelque chose dans ma vie, je suis aux Jeux Olympiques! ». Et puis on prend une petite leçon d’humilité, parce qu’en fait on vit dans un microcosme : il y en a déjà plein qui ont des médailles, qui ont fait les Jeux plusieurs fois, etc. Et on se dit : « Finalement, mon histoire est assez ordinaire! » »


Et quel est votre pire souvenir?

« Oh il y en a pas mal! Le plus honteux pour moi aura été sûrement mon premier Championnat d’Europe à Frauenfeld avec Harley. J’avais une équitation très approximative à l’époque et je ne savais que me coucher sur la mobylette et rouler à fond! L’épreuve était très difficile, il faisait chaud et… je tombe une 1ère fois. Je regarde mon chrono et j’étais toujours dans le temps. Donc au lieu de me calmer, je repars à fond! Je tombe une deuxième fois (à l’époque on avait encore le droit de tomber). Il me restait 2 obstacles à sauter mais au bout de 2 chutes, je décide quand même d’arrêter. Et heureusement le Dr Philippe Jouy, DTN de l’époque, était là et me dit : « Allez-y, sauter les 2 obstacles, on ne sait jamais! » Au final, comme le 4ème coéquipier était éliminé et que l’épreuve était très difficile, on récupère une médaille de bronze. J’ai une médaille mais j’ai honte de la bêtise que j’ai pu avoir à ce moment-là! »

Quel est votre concours préféré?

« J’aime beaucoup le Lion d’Angers. Même si je ne monte plus, j’essaye toujours d’avoir un cheval pour y aller. C’est un bel endroit, les obstacles sont beau, le public est connaisseur (ce qui n’est pas évident en France), c’est que du bonheur! »

 

 

Quels ont été les différents chevaux qui ont marqué votre carrière ?

« Mon premier était Bitneak, qui est malheureusement mort sur le cross à Pompadour en 1978. Après j’ai eu Harley, un hongre alezan de père anglo-arabe, avec qui j’ai connu mes premiers succès (3 fois Championne de France, 2 Championnats d’Europe, 2 Jeux Olympiques, Vice-championne du Monde…), puis Quart du Placineau qui m’a été confié par les Haras Nationaux car je n’avais pas les moyens de l’acheter. Avec lui, j’ai été 12ème en individuel aux Jeux Olympiques de Barcelone. Bien sûr, après il y a eu Summersong, mon coup de cœur! J’ai eu aussi Ut du Placineau, Dopé Doux, Crazy Love et dernièrement Cadiz, un cheval d’origine espagnol. »

Un petit mot sur Harley ?

« C’est une belle aventure! Le propriétaire avait dû le payer 3 000 Fr à l’époque (le genre d’histoire qui n’arrive qu’aux autres!)… et encore il était venu pour un autre cheval! Celui-là, comme ils n’arrivaient pas à l’attraper, il a dit : « c’est lui que je veux! ». Au début, c’était pour faire de la balade, mais comme il sautait très bien et qu’il était très compliqué, je l’ai récupéré par un heureux hasard. C’était un chouette cheval parce qu’il a compensé mon amateurisme de manière formidable! »

… et vous a permis de devenir professionnel!

« Il a surtout eu la bonté de ne pas me faire remarquer que je n’étais pas très bonne et de s’en accommoder! Comme je suis quelqu’un de très travailleur, acharné, obstiné (c’est pour ça qu’on dit que je suis chiante aussi!)  », avec cette perle rare je me suis dit : « j’ai une chance inouïe, il faut que je prenne des cours pour monter correctement. » C’était l’époque de Bardinet, à qui je dois beaucoup. Il s’est dit : « Le cheval est bon, la fille a l’air de vouloir bosser, elle n’est pas plus nulle qu’une autre si elle bosse! » et on a construit ça comme un Légo. »

Comment sont vos relations avec les chevaux?

« J’ai toujours considéré les chevaux comme des copains. En fait la compétition de Haut Niveau est traumatisante si on utilise des artifices, si on aime pas les chevaux, etc. mais si on les utilise comme des amis, comme des confidents,… on en fait des potes! En tout cas j’ai toujours eu des chevaux très généreux! Alors je les dresse, je suis très professionnelle avec eux, mais c’est avant tout des animaux que j’aime par-dessus tout. »

Vous reste-t-il un défi à relever?

« Hé bien, je n’ai jamais eu de médaille aux Jeux. Alors, maintenant que j’ai fait une croix sur la compétition, ce n’est plus vraiment un défi… Mais c’est ce qui m’a permis de rester motivée pendant toute ma carrière, je n’étais jamais rassasiée! Et d’ailleurs en vieillissant on relativise. Quand on est malheureux parce qu’on n’a pas eu de médaille aux Jeux, c’est que le reste ne va pas trop mal quand même! »

Si vous aviez un conseil à donner à une jeune cavalière qui veut devenir cavalière professionnelle?

« Je dirais surtout de continuer les études après le bac. Moi je remercie mon père qui m’a obligé à continuer (au moins Bac+2 parce qu’après je n’ai pas voulu) car c’est un bien nécessaire. Par exemple, quand vous voulez monter un dossier de sponsoring ou quand vous réalisez une interview, il faut être capable de bien parler spontanément, d’écrire correctement, de parler anglais aussi, de trouver la petite anecdote qui va bien, etc. C’est une valeur ajoutée importante pour un sportif et elle s’apprend. Mais je déconseille aux filles de rentrer dans le système « moniteur BPJEPS, » parce que c’est un petit milieu. »

Propos recueillis par Hedwige Favre