On est tous un peu fous, moi aussi des fois…

Sport
Cet article a été publié le : 23 octobre 2010 à 7h39
On est tous un peu fous, moi aussi des fois…



William Fox-Pitt, Anglais, 41 ans, William Fox-Pitt, le cavalier  anglais au palmarès et à l’élégance inouïs, ne se raconte pas. Il s’écoute. Vice-champion du monde à Lexington en 2010. Double médaillé olympique. Vainqueur des concours de Burghley (4 fois), Badminton et Blenheim.

William, que se passe-t-il quand vous êtes ici, au Lion ?

Je me sens privilégié, honoré d’être ici. Ici, vous avez tous les meilleurs cavaliers du monde. Ce n’est pas un hasard. Le Lion est le meilleur endroit du monde pour les jeunes chevaux. On est là avec les amis, les grooms, les chevaux. On est comme à la maison. Et puis tous ceux qui passent ici se retrouvent généralement quelques années plus tard avec des médailles autour du cou.

Racontez-nous la famille du complet.

Les gens, on les connaît tous, de façons différentes. Ce qui nous lie, c’est une passion commune et cette incertitude. Notre sport est très incertain, oui. Il est fait de jours sans, de travail, de voyages. De danger, aussi. On ne dit pas « Bonne chance » à un camarade comme ça. On le dit vraiment.

Cette vie, vous l’avez voulue ?

Oui. C’est une vie extraordinaire. Quelle vie ! Elle est dure. Elle procure du plaisir. Elle est dure physiquement. Un peu plus à 41 ans, un peu plus l’hiver arrivant, un peu plus quand les chevaux ne sont pas en bonne santé, un peu plus quand on en a 15 à monter, les dimanches, les week-ends. Sur une saison, je ne passe que quatre week-ends en famille. C’est facile de douter.

Vous faites quoi pour ne pas douter ?

J’essaie de penser le moins possible, d’être réaliste, pragmatique et optimiste. Tout peut arriver avec les chevaux.

« J’ai toujours préféré les chevaux paresseux »

Vous en avez marre, parfois ?

Parfois, j’aimerais rester sous ma couette le matin, oui. Mais ça ne dure jamais longtemps. Il y a toujours quelque chose qui me fait sortir de mon lit. Je pense à mes chevaux tout le temps.

Depuis tout petit ?

Oui. Même si petit, je n’aimais pas beaucoup monter. Quand je n’avais pas le contrôle d’une monture, je me jetais par terre ! Ça inquiétait ma mère… Je préférais monter sur des poneys paresseux. C’est toujours le cas, d’ailleurs. Je préfère des chevaux paresseux.

Est-ce le cas de votre 7 ans, Fernhill Highlight ?

Oui, il l’est. Mais il est encore un peu difficile. Je crois qu’il sera bien pour les 4 étoiles, mais il ne réfléchit pas encore tout seul. Il a du talent mais ne le sait pas encore. Sur le cross, il va regarder partout. Il serait intéressant qu’il regarde où il met les pieds. S’il le fait, il deviendra un crack.

Une vie sans chevaux, c’était imaginable ?

Non. Quand j’étais petit, Badminton, je pensais que c’était pour les fous. La taille des obstacles, la foule. Je croyais tout cela impossible. Mais malgré cela, les chevaux m’intéressaient. Je voulais être vétérinaire mais je n’étais pas assez intelligent (NDLR : il est diplômé d’Eton et de l’Université de Londres). Plus tard, je serai sans doute entraîneur de chevaux de course.

C’est quand, plus tard ?

Ma femme m’a posé la même question il y a peu ! Elle me demandait après quoi je courais encore, me disait que j’avais tout gagné. Je ne sais pas… Il y a d’autres choses que je voudrais gagner. Les Jeux olympiques de Londres en 2012, notamment. Un rêve. Mais pour ça, il faut avoir des chevaux doués. Et pour les trouver, il faut les monter.

Vous êtes le même sur un cheval et en dehors ?

Non… Je suis agressif à cheval. Je crois que tout le monde est un peu fou, vous savez. On le contrôle de façon différente, c’est tout. Moi aussi, je suis fou, des fois.

Le Mondial a 25 ans cette année. Il y a 25 ans, vous terminiez 8e de votre premier championnat national junior. Qu’avez-vous appris de vous depuis (il réfléchit longuement)...

Que j’aime beaucoup être occupé, remplir mes journées. Que j’aime le travail, mais uniquement le travail que j’aime. Et que je veux toujours être meilleur.

Interview de William Fox Pitti par Mathieu COUREAU. (Journaliste à Ouest-France). Un papier paru dans l’édition Maine et Loire du Grand quotidien français qui consacre plus d’une page à l’événement