Brice Luda : »j’ai peur pour mon sport »

Sport
Cet article a été publié le : 22 octobre 2010 à 17h53
Brice Luda : »j’ai peur pour mon sport »


Brice Luda connaît le Mondial du Lion-d’Angers comme sa poche. Fidèle parmi les fidèles, il est engagé, encore cette saison, en six et sept ans. Au bord du carré de dressage, hier matin, il voulait parler… Du Mondial, mais surtout du complet !

Entretien.

C’est quoi le Lion-d’Angers pour vous ?

J’y suis dans mon élément, mon métier est tout de même majoritairement tourné sur la préparation et la valorisation des jeunes chevaux. Il est agréable de pouvoir ainsi compter sur un concours de cette importance pour vérifier ou bonifier le bien fondé d’un travail de longues années.

Mais, le haut niveau, vous l’avez connu, et vous y reviendrez. Votre approche actuelle dans le domaine ?

Aujourd’hui, on se repose sur une Fédération qui ne va pas assez dans le sens du sport. Et je serai même sévère, qui ne semble pas consciente de l’image que véhicule le concours complet, elle s’en désintéressait presque. En deux mots, j’ai peur pour mon sport. Pas pour moi, pour mon sport et les copains qui font du très haut niveau.

Vous pouvez être plus explicite ?

Les propriétaires n’ont pas la place qu’ils méritent dans cette discipline, la Fédération les ignore un peu trop. On assiste à une fuite des chevaux vers l’étranger. Il y a une époque, pas si lointaine, où des gens ont essayé d’investir dans le milieu. Et contrairement à ce que l’on peut penser, ils ne demandaient pas grand-chose. Une reconnaissance !

Beaucoup ont ainsi traîné des pieds pour rejoindre Lexington ?

C’est clair ! Il y a eu des budgets pour offrir ou arrondir les billets d’avion pour rejoindre et vivre ces championnats du monde de l’intérieur. Mais, pas obligatoirement pour les personnes essentielles. Et cela conduit à ce que l’on pouvait craindre : les investisseurs de chevaux de complet y réfléchissent, aujourd’hui, à deux fois. pour signer des chèques.

Le fait de ne plus rapporter de médailles nuit également à la discipline ?

Les vrais passionnés ont toujours compris pourquoi l’on n’avait pas de médailles. Ce n’est pas la médaille qui les pousse à investir. Mais plutôt le manque de reconnaissance. On y revient toujours. Au contraire, cette absence de résultats aurait pu décupler leur motivation, avec ce rêve de reconstruire l’équipe de France.

« Il faut aller de l’avant »

Le changement d’entraîneur, c’était dans la logique des choses ?

Ce n’était pas essentiel. Quand je regarde une équipe de football qui perd trois matches, on change de coach. Mais, cela fait-il évoluer les choses ? Thierry Touzaint faisait avec ce qu’il avait, Laurent fait avec ce qu’il a. Rien n’a changé, on bricole avec des bouts de ficelle. Et c’est comme cela que le premier nommé à ramené beaucoup de médailles. Mais, à la force de tirer sur cette ficelle, elle a fini par casser.

Ceci dit, Laurent Bousquet porte une lourde succession ?

L’erreur n’est pas d’avoir donné le poste à Laurent, mais de ne pas avoir gardé Thierry jusqu’aux championnats du monde. C’est évident ! Il était le seul à posséder la capacité à analyser les raisons de ses contre-performances de Hong-Kong et Fontainebleau. Ce n’étaient pas des échecs. Il fallait lui laisser l’occasion de remettre le navire à flots et trouver ensuite, un nouveau commandant. On focalise aujourd’hui sur Laurent Bousquet, mais on pouvait nommer n’importe qui d’autre : le résultat aurait été le même. A Fontainebleau, si Nicolas Touzaint passe entre les fanions, on est sur le toit du monde, il ne faut pas oublier qu’en complet tout se joue sur des riens.

Les cavaliers font-ils corps. N’y-a-t-il pas de divisions entre vous, après cette année plutôt semée d’obstacles.

Je n’ai pas fait de nombreuses épreuves internationales, mais j’ai l’impression que tout le monde est unis et vise le même objectif : redonner à ce sport ses lettres de noblesse. Ceci dit, on a rien oublié. Je ne dispute un seul concours sans penser à Thierry. Par contre, il faut avancer, avancer…. aller dans le sens du sport.

Interview de Brice Luda, propos recueilli par Guy FICHET.